L’AFPC énonce clairement, tant dans ses Statuts que dans sa Déclaration de principe sur les droits de la personne, qu’elle ne tolère aucune pratique discriminatoire pour quelque motif que ce soit. Le syndicat s’engage aussi à combattre avec acharnement la discrimination en milieu de travail.
Plusieurs textes de loi protègent les droits de la personne : chartes des droits et libertés, lois sur les relations de travail et, dans une certaine mesure, lois en matière de santé et sécurité. Les droits de la personne sont aussi protégés dans les conventions collectives.
Les pratiques, les règles en milieu de travail et les dispositions des conventions collectives qui, de prime abord, ne semblent pas discriminatoires peuvent néanmoins avoir des effets discriminatoires sur une personne ou un groupe. La Cour suprême a stipulé, dans la décision Meiorin (1999), que les employeurs et les fournisseurs de services doivent intégrer des notions d’égalité aux normes de travail. Elle conférait ainsi aux employeurs une obligation positive de concevoir des normes qui ne sont pas discriminatoires.
Si une entente négociée ou une disposition d’une convention collective ont des effets discriminatoires, les syndicats et les employeurs doivent agir, de manière proactive et concertée, afin de les supprimer. Qu’ils aient participé ou non à la négociation ou à la mise en œuvre de la disposition discriminatoire, les syndicats doivent aider les employeurs à mettre en place des mesures d’adaptation. Par ailleurs, aux termes d’une décision arbitrale rendue dernièrement, les syndicats doivent faire preuve de vigilance et représenter en bonne et due forme leurs membres dans les causes relatives aux droits de la personne.
Déposer un grief est le meilleur recours lorsqu’il y a discrimination en milieu de travail. Le syndicat a le droit et le devoir d’exiger que les infractions aux droits de la personne fassent l’objet d’un examen.
Les délégués syndicaux et les sections locales peuvent s’attaquer à la discrimination en milieu de travail avant même que des membres déposent des plaintes ou des griefs relatifs aux droits de la personne. Il existe divers moyens d’empêcher les pratiques discriminatoires en milieu de travail : formation sur les droits de la personne, sondages sur la culture de l’organisation, programmes d’équité en emploi, formation en matière de lutte contre le harcèlement et mesures favorisant la création de milieux de travail intégrateurs. Malheureusement, les efforts déployés par les syndicats ne suffisent pas toujours à éliminer la discrimination en milieu de travail.
QU’ENTEND-ON PAR « VIOLATION DES DROITS DE LA PERSONNE »?
Il s’agit d’actes ou de pratiques discriminatoires qui ont pour effet de priver une personne de ses droits (droit à un emploi, à une promotion, par ex.).
Il s’agit d’actes discriminatoires commis contre une personne lorsqu’elle cherche un emploi ou un logement, lorsqu’elle veut acheter des biens ou lorsqu’elle a besoin de services.
Il s’agit d’actes discriminatoires qui reposent sur un motif illicite. Les délégués syndicaux ne doivent pas oublier que le harcèlement fondé sur un motif illicite est une forme de discrimination au même titre que le non-respect de l’obligation d’adaptation pour quelque raison que ce soit (handicap, situation familiale, culture, etc.).
MOTIFS ILLICITES
Les lois sur les droits de la personne énoncent les motifs illicites de discrimination. On les retrouve aussi dans les dispositions anti-discrimination incluses aux conventions collectives.
Aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne, il est interditd’exercer de la discrimination fondée sur :
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la race;
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l’origine nationale ou ethnique;
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la couleur;
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la religion;
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l’âge;
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le sexe (y compris la grossesse et l’accouchement);
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l’orientation sexuelle;
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l’état matrimonial;
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la situation de famille;
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la déficience physique ou mentale (y compris la dépendance à l’alcool ou aux drogues);
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l’état de personne graciée (c’est-à-dire une personne dont la condamnation a été effacée).
Au Québec, la Charte des droits et libertés interdit aussi la discrimination fondée sur la « condition sociale ».
GRIEFS
La majorité des conventions collectives négociées par l’AFPC renferment un article sur l’élimination de la discrimination. En voici deux exemples.
Table 1 (Groupe PA)
« 19.01 Il n’y aura aucune discrimination, ingérence, restriction, coercition, harcèlement, intimidation, ni aucune mesure disciplinaire exercée ou appliquée à l’égard d’un employé-e du fait de son âge, sa race, ses croyances, sa couleur, son origine nationale ou ethnique, sa confession religieuse, son sexe, son orientation sexuelle, sa situation familiale, son incapacité mentale ou physique, son adhésion à l’Alliance ou son activité dans celle-ci, son état matrimonial ou une condamnation pour laquelle l’employé-e a été gracié. »
Musée canadien des civilisations
« 14.01 La Société et l’Alliance conviennent qu’il n’y aura ni discrimination ni harcèlement exercé en milieu de travail à l’égard d’un employé du fait de son âge, de son état matrimonial, de sa situation de famille, de sa race, de ses croyances, de sa couleur, de son origine nationale ou ethnique, de son appartenance politique ou de sa confession religieuse, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son incapacité mentale ou physique, de son adhésion au syndicat ou de son activité au sein de celui-ci, ou de l’état de personne graciée. »
PLAINTES RELATIVES AUX DROITS DE LA PERSONNE
Les membres qui croient être victimes de discrimination fondée sur un ou plusieurs des motifs illicites peuvent déposer une plainte à la commission des droits de la personne compétente. Afin de respecter les délais prescrits dans les lois sur les droits de la personne, il est fortement conseillé de déposer simultanément la plainte et le grief pour discrimination. Même si les arbitres sont habilités à interpréter les lois sur les droits de la personne, il peut y avoir des erreurs lors du processus de règlement des griefs. La plainte servira alors de caution. Elle sera mise en suspens, toutefois, jusqu’à ce que le grief soit résolu.
Article 7 de la LCDP :
« Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :
a)de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;
b)de le défavoriser en cours d’emploi. »
Conformément à La Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP), on peut déposer une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne (CCDP). La partie plaignante a un an, à compter de la date à laquelle l’incident ou les circonstances qu’elle juge discriminatoires sont survenus, pour déposer une plainte. Le processus à suivre se trouve sur le site de la Commission : www.chrc-ccdp.ca.
Article 5 du CDPO :
« Toute personne a droit à un traitement égal en matière d’emploi, sans discrimination fondée sur la race, l’ascendance, le lieu d’origine, la couleur, l’origine ethnique, la citoyenneté, la croyance, le sexe, l’orientation sexuelle, l’âge, l’existence d’un casier judiciaire, l’état matrimonial, l’état familial ou un handicap. »
Depuis juin 2008, on peut, en vertu du Code des droits de la personne de l’Ontario, déposer une plainte auprès du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario. Le processus à suivre se trouve sur le site du Tribunal :
Article 16 de la CDLPQ :
« Nul ne peut exercer de discrimination dans l’embauche, l’apprentissage, la durée de la période de probation, la formation professionnelle, la promotion, la mutation, le déplacement, la mise à pied, la suspension, le renvoi ou les conditions de travail d’une personne ainsi que dans l’établissement de catégories ou de classifications d’emploi. »
Au Québec, les plaintes invoquant la Charte des droits et libertés de la personne sont déposées auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Le processus à suivre se trouve sur le site de la Commission :
POLITIQUE DE L’EMPLOYEUR
Il est possible que des employeurs aient déjà mis en œuvre une politique sur les droits de la personne, laquelle énonce les principes et les pratiques qu’ils doivent adopter afin de respecter leurs obligations en la matière. Depuis le prononcé de la décision dans l’affaire Bonnie Robichaud c. Canada (Conseil du Trésor), les employeurs doivent adopter une politique anti-harcèlement. Par ailleurs, bon nombre d’employeurs ont adopté une politique sur l’obligation d’adaptation comportant habituellement un mécanisme de traitement des plaintes à l’intention des personnes qui jugent que la politique n’a pas été respectée.
LA SITUATION À LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE
Il est désormais possible, en vertu de la nouvelle Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), de renvoyer des griefs invoquant la LCDP, sauf en ce qui concerne l’équité salariale, et d’obtenir une réparation pécuniaire (article 208). La CCDP a le droit d’être avisée de ces griefs; elle a également qualité pour présenter des observations à l’arbitre de grief.
LE RÈGLEMENT DES GRIEFS RELATIFS AUX DROITS DE LA PERSONNE
Il arrive, parfois, qu’une personne dise avoir été l’objet d’une pratique injuste et non de discrimination. C’est aux délégués syndicaux qu’il revient d’établir s’il y a eu discrimination ou non.
Par ailleurs, il se peut que certaines personnes appartenant à des groupes protégés par les lois sur les droits de la personne aient été victimes d’exclusion ou de discrimination ailleurs qu’au travail. Compte tenu des répercussions que peut avoir la discrimination sur les plans affectif, physique et psychologique, quiconque en est victime au travail aura sans doute besoin du soutien d’autrui, y compris des représentantes et représentants syndicaux (PAE, counselling, groupes de revendication, comités d’équité de l’AFPC, par exemple).
RECUEILLIR LES ÉLÉMENTS DE PREUVE
Les éléments de preuve sont essentiels à l’analyse des plaintes. Sinon, il est impossible de déterminer, hors de tout doute, si l’acte ou la pratique qui serait discriminatoire repose sur un des motifs illicites de distinction. Les délégués syndicaux ont un rôle important à jouer à cet égard.
La personne qui fait l’objet de discrimination devra fournir des renseignements ou des preuves. On pourrait aussi en demander aux témoins et aux spécialistes (experts en médecine, par exemple). Les éléments de preuve à recueillir varient selon chaque cas, puisqu’il n’y en a pas deux pareils. Cela dit, certains éléments sont communs à tous les cas : a) la personne victime de discrimination appartient à l’un des groupes visés par les lois sur les droits de la personne; b) la pratique discriminatoire se rattache à l’un des motifs illicites (exemple : refuser un emploi à une personne en raison de sa race); et c) l’impact de la pratique discriminatoire (exemple : la personne a dû prendre un congé).
NOTES COMPLÉMENTAIRES
Exercer des représailles contre des membres qui déposent des plaintes ou des griefs relatifs aux droits de la personne constitue une violation des droits de ces personnes. Hélas, les membres qui entreprennent cette démarche sont souvent rabaissés ou ostracisés. Il est donc crucial que les délégués syndicaux dénoncent ces incidents, les inscrivent au dossier de plainte ou du grief et les signalent à qui de droit. Cette information pourrait étayer la demande en dommages-intérêts punitifs présentée par le syndicat.
Refuser de renouveler le contrat d’une travailleuse ou d’un travailleur temporaire ou y mettre fin prématurément parce que cette personne a exprimé des besoins spéciaux, est enceinte, s’est plainte de racisme, etc., constitue une pratique discriminatoire.
Dans les cas de harcèlement impliquant d’autres membres, les délégués syndicaux interviendront conformément aux règles énoncées dans la Déclaration de principes de l’AFPC sur le harcèlement en milieu syndical.